La Princesse effacée, Alexandra de Broca, Points, 2011, 404 pages


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Quatrième de couv’ :

Marie-Thérèse, fille de Louis XVI, est en prison depuis trois ans. Elle ignore tout du sort de Marie-Antoinette, sa mère. Elle accueille avec un silence méprisant Renée, envoyée par la République pour adoucir sa peine. Peu à peu, une complicité se noue entre les deux femmes. Mais en pleine guerre civile, certains républicains voudraient éliminer la dernière des Capet, ultime symbole de la Royauté…

Alexandra de Broca est écrivain et scénariste. La Princesse effacée est son premier livre. C’est aussi le premier roman consacré à Marie-Thérèse de France, unique rescapée de la famille royale.

« Très documenté, mais en même temps porté par l’imagination, c’est un roman divertissant. Et touchant. » Sud Ouest

L’avis de votre bien dévouée :

Un ouvrage commençant par une si belle citation de Raymond Radiguet ne pouvait que m’inspirer : « Bonheur, je ne t’ai reconnu qu’au bruit que tu fis en partant ».

J’ai reçu ce livre dans le cadre d’un partenariat avec Livraddict, et Points, que je remercie VIVEMENT de m’avoir sélectionnée, car cette lecture fut un véritable délice.

Pour vous recadrer, j’ai une nette tendance à apprécier les romans historiques, et j’ai pas mal bouquiné sur la vie de Marie-Antoinette,  en me penchant non seulement sur sa vie, mais aussi sur la procédure inique qui l’a menée à l’échafaud. A cet égard, je vous recommande tout particulièrement la lecture des trois tomes (qui se dévorent à toute vitesse) de Paul Bellaiche Daninos, intitulés Les Soixante-Seize jours de Marie-Antoinette à la Conciergerie.

Bref, venons-en à nos moutons. Ici, il ne s’agit pas de Marie-Antoinette (bien qu’elle soit largement évoquée), mais de sa fille, Marie-Thérèse, autrement appelée « Madame Royale » (« Mousseline » pour les intimes). Si les médias, les ouvrages, l’histoire  font souvent référence à Louis XVI, Marie-Antoinette, et au Dauphin, il faut reconnaître que, très injustement,  peu de place a jusque-là été laissée à la fille aînée du couple royal. Et pourtant : seule rescapée de la Révolution, cette enfant de la famille royale méritait largement que l’on s’intéresse à elle. Voici chose faite grâce à Alexandra de Broca, qui s’est attelée à la tâche avec beaucoup d’implication. Extrêmement documenté, ce roman (ou biographie ? –mais pas dans le sens académique du terme)  nous apprend tant à son sujet (sans vilain jeu de mot).

1795. Tout commence par la découverte de Renée Chantereine (le hasard fit qu’elle se nomma ainsi !), citoyenne de la République. Sollicitée par Barras, elle est mandatée pour se rendre dans le cachot de l’orpheline royale, afin d’adoucir sa peine. Jamais elle n’aurait pu se préparer à ce qu’elle allait découvrir : une enfant apeurée, muette, sale, dans une cellule sans lumière, pestilentielle, lugubre. La jeune fille ignore tout de la vie extérieure, jusqu’au sort réservé à sa mère, son frère, sa tante. Tous sont morts. Elle devra l’apprendre, sans sombrer dans la folie.

Après la méfiance, que Marie-Thérèse ne peut s’empêcher d’éprouver à l’égard de sa visiteuse, des liens de confiance vont peu à peu se tisser entre les deux femmes. Renée Chantereine pourra prendre soin de sa protégée, parvenir à la faire parler de nouveau, et notamment, écrire, sous sa dictée, la façon dont cette enfant a vécu le drame de sa famille.

Bouleversée par le sort de la « Citoyenne Capet », et par son constat (tous les hommes sont égaux, sauf les enfants royaux),  Chantereine, face à ces contradictions, exigera de la République de meilleures conditions de détention pour cette innocente  victime, condamnée en dépit des  principes énoncés dans la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen. Les fenêtres occultées seront ouvertes ; des vêtements propres acheminés, un nécessaire de toilette mis à disposition.

Poignante, émouvante, cette  narration m’a indignée. Comment une République a-t-elle pu infliger un tel traitement à une enfant ? Révoltant.

Les questionnements que soulèvent cet ouvrage imposent la réflexion : une fois libérée, comment l’héritière des Capet pourrait-elle aimer le  peuple français, après que ce dernier ait maltraité sa famille, l’ait humiliée, infligé les pires peines ? Comment se construire après une telle expérience de  la vie ? Comment ne pas haïr, comme l’avait prescrit son défunt père dans son testament ?

Affaiblie par cette vie qu’elle n’a pas choisi, mais d’une solidité étonnante, et d’une grande dignité, Marie-Thérèse force le respect.

Je reste admirative devant le travail de la romancière, qui nous livre ici une bien triste page de notre histoire, avec beaucoup de tact et de réalisme. Bravo à elle, d’autant qu’il s’agit de son premier roman.

Une découverte à partager. Un grand et beau moment. Un livre tourne-page et intelligent.

Citations marquantes :

« Les animaux ne me font pas peur ; les pires cruautés viennent des hommes. L’auriez-vous oublié ? »

« Mon seul guide est la nature et son sempiternel cycle de recommencement. Mes fils se devaient de vivre peu, comme certaines fleurs ! Ils m’ont enchanté longtemps, puis ils sont partis… Je suis le vieil arbre qui ne donne pas de fruits, mais qui protège les jeunes plantations alentour de l’ombre que je leur procure, jusqu’à ce qu’un arbre voisin, jeune et vigoureux, ne vienne un jour m’assécher à son tour ! »

A propos lapublivore

Bienvenue sur mon blog de lecture ! Juste une envie de partager mes coups de cœur, mes coups de griffe, et mon amour des livres. Je ne peux m'empêcher, de façon générale, de donner mon avis sur tout, alors maintenant, c'est officiel -en ce qui concerne les bouquins du moins- je sévis sur la toile :) Bonnes lectures à tous
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8 commentaires pour La Princesse effacée, Alexandra de Broca, Points, 2011, 404 pages

  1. Natacha dit :

    Une très jolie critique ^^ Concernant les biographies de Marie Antoinette j’aime citer Antonia Fraser qui est selon moi la meilleure biographe ! Je note le livre sur les conditions à la conciergerie ^^
    Une très jolie critique, oui j’ai été surprise par la précision de la romancière sachant que c’était son premier roman ^^
    Pour la citation je l’ai prise sur babelio, je n’avais pas mon livre sur la main et je trouvais la citation très réaliste ^^ (il me semble d’ailleurs que tu es à l’initiative de cette citation ^^)
    Je l’ai adoré, ca fait plaisir d’avoir un roman agréable à lire

    • lapublivore dit :

      Chouette, nous sommes deux fans 🙂 Concernant Antonia Fraser, je crois que dans la lancée, je vais m’y replonger, excellente idée ^^
      Merci pour le compliment sur mon billet – ça fait toujours plaisir ! 😉

  2. Je ne suis pas forcément très portée sur les romans historiques en général mais vu ton enthousiasme pour celui-ci, je le lirais peut-être un jour 🙂

  3. cajou dit :

    Wow, quel billet ! Comment résister à de tels mots ? Puis, tout comme toi, je trouve la citation en début de livre juste magnifique ce qui en dit déjà beaucoup sur l’auteure et ses gouts ! Je l’ajoute de ce pas à ma Liste d’Envies et je te remercie pour la découverte 🙂
    Cajou

  4. Amaryllis dit :

    Je suis contente de trouver quelqu’un qui a lu ce roman, c’est une pure merveille. Un livre intelligent, on apprend beaucoup (j’aime beaucoup les romans historiques mais je ne suis pas une spécialiste de la période et je ne connaissais pas du tout ce personnage). J’ai franchement adoré, ce n’est pas du tout gangnan. J’ai adoré, à lire pour ceux qui aiment cette période historique mais c’est aussi une belle histoire de femmes.

  5. jostein dit :

    Je dois le recevoir en partenariat avec Partage lecture. Je l’attends mais il tarde à venir.

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